Rendre compte
"Fournir des explications, faire un compte-rendu, décrire. Synonyme : expliquer, justifier.
Cette expression est apparue dans la seconde moitié du XXe siècle dans le langage courant, sans être rattachée à un domaine particulier, avec le sens de "Décrire, détailler ce qu'on a fait ou ce qu'on a vu". L'intern@ute
"[...] La problématique sociale constitue un positionnement, un discours construit, étayé, cohérent vis-à-vis de la question de départ, qui permet à la fois de mieux préciser les termes de cette même question et d’y apporter des éléments de réponse. C’est une certaine manière de voir le phénomène étudié, d’en rendre compte."...
Pascal Lièvrecairn.info/manuel-d-initiation-a-la-recherche-en-travail-page-77
"La pensée scientifique appliquée à l’analyse empirique de la vie sociale est sujette à des illusions dont il est difficile de mesurer toute l’ampleur...
...La recherche des causes réelles des phénomènes sociaux, autrement dit l’explication sociologique, ne vise pas pour autant à transcrire la complexité de la réalité concrète...
... Comment passer des phénomènes totaux observés à l’explicitation de leurs causes réelles ? Dans quelle mesure ces causes exhumées se donnent pour réelles dès lors qu’on n’accède qu’à des combinaisons de leurs effets ? Bref, comment l’explication sociologique est-elle possible ? Pour offrir des éléments de réponse à ces questions, deux pôles dans l’ensemble des modèles de l’action humaine sont distingués. L’un des pôles est relatif aux modèles à vocation descriptive, dont la finalité est le réalisme des effets. Le second pôle est relatif aux modèles à vocation explicative, dont la finalité est le réalisme des causes. Le problème de la différenciation pratique de ces deux pôles, de l’impossibilité de rendre compte simultanément de manière réaliste des causes et des effets des processus sociaux réels, s’ouvre sur la question de la validité des modèles en sciences sociales...
... Un modèle scientifique offre une représentation sélective et symbolique d’un phénomène empirique (système ou processus)...
...on parle de modèle dès lors qu’une réalité que l’intelligence peut manipuler est confrontée analogiquement à une autre réalité afin d’en rendre compte de manière économique et scientifiquement exploitable...
...Un phénomène simple peut être à la fois reproduit et expliqué. Les facteurs représentés, qui satisfont les conditions méthodologiques du réalisme causal, produisent alors les effets observés réellement...
Des actes sociaux simples sont à la fois reproduits et expliqués par la confrontation des motifs des acteurs à leur situation, laquelle met en jeu leur position sociale et leurs dispositions cognitives en particulier.
... les finalités descriptives et les finalités explicatives des modèles tendent à se distinguer dès lors que la complexité des phénomènes en jeu impose des simplifications substantielles. En effet, selon qu’on s’attache à décrire ou à expliquer, on met en œuvre deux types différents de réalisme. Dans la description et la prévision, le réalisme porte sur les effets, tandis que dans l’explication, il porte sur les causes. Dans le premier cas, les simplifications nécessaires portent sur les mécanismes, tandis que dans le second elles portent sur les faits et les données. En réalité, la pratique scientifique ne conduit pas à une distinction aussi nette des types de modèles réalisés. On peut considérer que l’ensemble de ceux-ci, au sein même de la pensée formelle, se situent plutôt entre deux pôles, l’un descriptif, l’autre explicatif.
...Quels critères permettent-ils d’estimer la validité des modèles, leur pertinence descriptive ou explicative ? Ce problème apparaît d’autant plus clairement que, pour rendre compte d’une réalité complexe, le réalisme des causes tend à s’opposer au réalisme des effets. Autrement dit, l’adéquation aux données de l’observation ne permet pas de juger la pertinence explicative des modèles, tandis que le réalisme causal des hypothèses tend à contrarier leurs potentialités descriptives...
[...] la correspondance entre représentations formelles et circonstances concrètes, est là pour « contenir » le modèle dans ses limites représentatives et prévenir tout débordement. Cette condition place sur un même plan formel les éventuelles parties explicatives du modèle assurant le « réalisme des causes » et ses éventuelles parties descriptives assurant le « réalisme des effets », tout au moins ne les différencie-t-elle potentiellement que par leur potentiel d’extrapolation (spécifié par les conditions de correspondance)...
[...] Pour apprécier la robustesse explicative d’un modèle, il est nécessaire de pouvoir séparer méthodologiquement les hypothèses descriptives (réalisme des effets) et les hypothèses explicatives (réalisme des causes). Cette distinction est possible seulement si les phénomènes appréhendés par les premières peuvent être considérés comme exogènes aux phénomènes appréhendés par les secondes, et inversement, dans le cadre de la théorie développée. Cette condition peut être tenue comme faisant partie intégrante de la précision du champ d’application des hypothèses dans l’optique friedmanienne.
Plus précisément ici, dans un but d’explication du phénomène social représenté, elle prévient le jeu de facteurs implicites sur les facteurs explicatifs du modèle. Les éléments essentiellement descriptifs doivent en effet pouvoir être développés dans la perspective d’une théorie explicative plus générale sans réduire à néant le modèle, c’est-à-dire le rôle imputé aux facteurs explicatifs.
Les critères méthodologiques de l’explication, qui dépendent d’options théoriques préalables, sont alors applicables aux hypothèses explicatives. Les conditions de validité empirique, adaptées en fonction des finalités descriptives du modèle, permettent enfin d’apprécier si les hypothèses avancées sont conformes aux données de l’observation."
Emmanuelle Bulle Les modèles formels et l'explication en sciences sociales