Usager

"Un usager est une personne qui utilise un service public, par opposition : au client, qui utilise les services d'une entreprise privée, à l'adhérent, qui est membre d'une organisation privée. On parle de l'usage d'un bien, alors que l'on parle d'usagers d'un service. Exemples : usager des transports en commun, usager d'une bibliothèque ou d'une médiathèque... usager de la santé qui utilise ou est susceptible d'avoir à utiliser les services de santé, publics ou privés." Wikipédia

"Le terme d’usager recouvre des situations très diverses dont l’essence commune peut être dégagée en prenant comme point de départ une définition ample du service public. La définition qui en résulte n’occulte pas le fait qu’il existe des cas particuliers, ceux de l’usager de l’ouvrage public et de l’usager du domaine public, cas qui ne seront pas abordés dans cet article.
L’usager du service public est la personne physique ou morale qui a recours individuellement, personnellement, effectivement et directement à une prestation. La notion se démarque de celle de bénéficiaires. Cette dernière désigne l’ensemble des individus qui bénéficient collectivement, anonymement et indirectement de l’existence des services publics en général, autrement dit, le corps social. Elle ne se confond pas non plus avec celle d’administré, dans la mesure où celle-ci est plus large et tend à se confondre avec la notion de bénéficiaires.
La qualification d’usager entraîne application d’un régime juridique spécifique. Il n’est pas possible de subdiviser ce régime entre celui qui serait applicable à l’usager des services public administratifs et celui qui serait attaché à l’usager des services public industriels et commerciaux, d’autant plus que cette distinction est des plus relatives (B. Seiller, « L’érosion de la distinction SPA-SPIC », AJDA, 2005, n° 8, p. 417).
Les droits et obligations de l’usager du service public sont entièrement marqués par les trois lois du service public dégagées par Louis Rolland, c’est-à-dire les principes d’égalité, de mutabilité et de continuité…"

Usager Camille Morio Dans Dictionnaire d'administration publique (2014), pages 515 à 516

"Vous avez dit « usager » ?

par  | Mar 20, 2016 | Droit des usagers | 0 commentaires

Faut-il remettre en cause la notion d’usager comme le propose le rapport du Conseil supérieur du travail social (CSTS) intitulé « Refonder le rapport aux personnes : Merci de ne plus nous appeler usagers» (Voir ASH n°2898 du 20-02-15, p. 26) ? Non réagit Roland Janvier, directeur général de la Fondation Massé Trévidy, car cette expression renvoie au rapport d’usage et à la conflictualité inhérente à la relation d’aide[1].

L’originalité du rapport du CSTS est d’induire le concept de « résonnance » : « le travail social ‘’en résonnance’’ est une forme d’intervention qui donne ampleur, force et vigueur aux initiatives des ‘’usagers’’, qui soutient en apportant ses moyens et ses ressources. » Jolie idée qui réactualise, en les liant, les notions d’empathie et d’empowerment. Certes, la bienveillance prévaut à la relation d’altérité dans le travail avec autrui. Ceci étant, quels sont les tenants et les aboutissants de cette « résonnance » ? Question indispensable si on veut éviter que la relation d’aide ne « sonne creux » et que les réflexions ne « raisonnent dans le vide ».

C’est là que s’ouvre une controverse avec la position du CSTS, résumée dans le sous-titre du rapport : « Merci de ne plus nous appeler usagers ». Le terme « usager » fait débat de longue date. Dès la publication de la loi 2002-2, des rhétoriques le mettaient en cause masquant mal, dans les faits, une résistance farouche à voir les usagers mieux garantis dans leurs droits et libertés fondamentales. Le CSTS propose « de proscrire le mot ‘’usager’’ dès lors que son emploi n’est pas référé à un objet, un dispositif, une politique… » . Sur ce point, nous ne pouvons qu’être d’accord : le terme d’usager n’est pas un en soit qui pourrait introduire une catégorie de sous-citoyenneté. Il est systématiquement lié à un dispositif d’action. Le rapport évoque des termes usités dans le secteur : bénéficiaire, habitant, acteur, citoyen…, usager faisant penser à « usagé, assujetti, incapable… » Il propose d’autres termes : personne accueillie, personne accompagnée, voire même une expression aussi neutre que « les gens ». Toutes substitutions terminologiques qui, tentant de mieux qualifier la personne, ne disent plus rien de la nature de la relation qui justifie l’interaction dans une relation d’aide.

Car c’est là, au cœur de la relation d’aide, que le terme d’usager trouve sa raison d’être et le sens de ce qui se joue. Etre usager, c’est s’inscrire dans un rapport d’usage. Par rapport d’usage, nous entendons la manière dont les acteurs de la relation – intervenants et bénéficiaires d’interventions sociales et médico-sociales – font « usage » des dispositifs d’accompagnement et de prise en charge. Au-delà de la simple « résonnance », ce qui entre en scène dans le travail avec et pour autrui, c’est un ensemble de moyens techniques[2]. Ces objets techniques ne sont pas seulement des vecteurs de l’aide apportée, ils sont le lieu de rapports de force entre les uns et les autres. Il y a donc un enjeu de pouvoir quant à la manière dont les usagers « font usage » des dispositifs sociotechniques. Cela revient à dire que l’usager ne peut être réduit à l’utilisateur, ni l’usage à une simple utilisation. Le rapport d’usage induit des stratégies, des tentatives plus ou moins abouties, de détournement. Il permet au destinataire de l’action de tirer profit du système technique dans lequel il s’inscrit. Intégrer le rapport d’usage, c’est réhabiliter, au-delà de toute approche fonctionnaliste, la médiation technique comme support de l’échange, comme levier du développement du pouvoir d’agir des personnes – salariés comme usagers – comme espace de créativité possible. Le rapport d’usage réinscrit l’usager dans le rapport social. Il permet de repolitiser l’action sociale[3], c’est-à-dire de mettre en débat un projet de société.

Finalement, les débats sémantiques du CSTS ne tendent-ils pas à égarer la problématique dans un lien instrumental ? Le rapport ne porte-t-il pas, implicitement, cette conception selon laquelle la participation des bénéficiaires ne viserait que l’accroissement de l’efficacité de l’intervention dans une simple réponse à la demande ?  La performance des interventions sociale reposerait ainsi sur un rapport organique entre un problème, une action et ses effets. Elle relève d’une vision positiviste qui réduit la qualité de la prestation à son résultat mesurable sans intégrer les dimensions sociétales de l’action et donc ses significations politiques (en termes de participation à la vie de la cité). La référence au rapport d’usage, consacrée dans l’expression « usager », porte une toute autre ambition. Elle suppose que l’efficacité du travail social revient à permettre à chacun de prendre en main son destin, pour soi et avec les autres. Elle vise ainsi à créer les conditions d’une transformation sociale fondée sur la capacité de faire usage des dispositifs d’action. La perspective qui s’ouvre alors, et que le CSTS n’a pas développée, s’affranchit du jeu de rôles et d’attente de rôles pour aborder la relation d’aide comme un rapport social, condition même de la promotion de la citoyenneté des usagers.

Alors, de grâce, appelez-nous usagers !

[1]Cf. R. Janvier, « Vous avez dit usager ? Le rapport d’usage en action sociale». ESF, 2015.

[2] Contrats de séjour, organisations institutionnelles, processus thérapeutiques, éducatifs ou pédagogiques, structures d’hébergement, livrets d’accueil, dispositifs d’évaluation, etc.).

[3] Voir le site : www.repolitiserlactionsociale.org."

rolandjanvier.org/droit-usagers

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